Jeudi 18 Ramadan 1445 - 28 mars 2024
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Le sens de Ta’aalaa djadduka qui figure dans l’invocation d’ouverture de la prière

Question

J’ai reçu hier un message dont voici le texte: «La plupart des prieurs commettent une faute dans l’invocation d’ouverture de la prière. Car ils disent ta’aalaa djadduka (grand père). Ce qui est une faute grave car le Transcendant et Très-haut n’a ni père ni grand père. La juste orthographie est djidduka (grandeur) Qu’en est-il de la justesse de ces propos? Qu’est-ce qui est exact: djadduka ou djidduka?

Texte de la réponse

Louange à Allah.

Muslim a rapporté dans son Sahih(399) qu’Omar ibn al-Khattab prononçait à haute voix ces mots:

Subhanaka Allahumma wa bihamdika, tabaarak ismuka wa ta’aalaa djadduka wa laa ilaaha illaha ghayruka

Cette invocation est tantôt hautement attribuée (au Prophète) tantôt attribuée à Omar et à d’autres compagnons du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui)

Voir as-sunan li Ad-daraqutni (2/58) et suivants; silsilatoul ahaadith as-sahihah (2996) et Sifatou salait an-nabiy (Bénédiction et salut soient sur lui) (p.93) par al-Albani (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde)

Les ulémas du hadith et du droit musulmans ont convenu que la juste orthographie du mot est djadduka qui signifie grandeur. Dès lors l’expression signifie: que Sa grandeur soit exaltée

An-Nawawi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit dans Tahdheeb al-asmaa wal-lughaat (3/331) la phrase ta’aalaa djadduka qui figure dans l’invocation d’ouverture de la prière signifie: que Sa grandeur soit exaltée! On dit que le terme djadd signifie richesse.Les deux explications sont bonnes. Al-Khattabi n’a mentionné que grandeur .C’est le sens qui est donné au vocable dans la parole du Très-haut à propos des Djinn: En vérité notre Seigneur -que Sa grandeur soit exaltée -ne S'est donné ni compagne, ni enfant ! (Coran,72:3)

Dans al-muttalie alla abwaab al-muqnie (p.46) al-Baali dit: djadduka est la bonne orthographie. Al-Bahouti (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit dans Kashshaaf al-quinaa(2/478): « C’est djiadduka qui est la bonne orthographie. Cela signifie: que Sa grandeur soit exaltée.

Dans son commentaire marginal sur ar-Rawdh al-murbie (2/22), Ibn al-Qasim dit: djadd signifie grandeur, chance, bonheur , et richesse. Ta’aalaa signifie s’est amplifié.L’étymologie du verbe renvoie à l’ampleur et à l’exaltation et traduit le summum de sublimité. En d’autres termes: Tu es le Plus Auguste.Ta grandeur est infinie car elle dépasse toute autre.Ton importance dépasse toute autre.Ton pouvoir l’emporte sur tout autre. »

Dans Tawdhiih al-ahkaam, charh boulough al-maraam d’al-Bassam (2/169) on lit: djadduka signifie : Ta grandeur, Ta majesté et Ton pouvoir. Le terme djadd revient souvent dans le saint Coran et la Sunna prophétique.Allah le Très-haut dit à propos des djinn: En vérité notre Seigneur -que Sa grandeur soit exaltée -ne S'est donné ni compagne, ni enfant ! (Coran,72:3) Expliquant la phrase, as-Saadi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit: Sa grandeur est infinie et Ses noms sont sublimes. (P.890)

Al-Qurtubi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit: djaddu rabbinaa signifie Sa grandeur et Sa majesté. (P.8/19)

Le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) a dit: Seigneur! Rien ne peut bloquer ce que Tu veux donner.Rien ne peut débloquer ce que Tu refuses de donner. La seule chance ne sert à rien au chanceux auprès de Toi. (Rapporté par al-Boukhari,844 et par Mouslim,593)

Pour les ulémas, cela signifie: la chance, la richesse et le prestige ne servent à rien à leurs détenteurs auprès de Toi. Pour Ibn Radjab, le terme djadd qui figure dans la parole du Prophète : wa la yanfaou dhal-djadd mika al-djadd signifie richesse. C’est pour dire : la seule richesse ne sert à rien au riche auprès de Toi. » Extrait de Fateh al-Baari d’Ibn Radjab (7/417)

Dans son commentaire sur le Sahih de Mouslim, an-Nawawi écrit: L’expression à retenir est dhal-djadd d’après l’orthographe confirmée par les ulémas anciens et contemporains.

Pour Ibn Abdoul Barr, certaines versions donnent djidd. Abou Djaafar Muhammad at-Tabari dit c’est plutôt djadd..Ach-Chaybaani retient djidd, contrairement à ce qui est connu chez les transmetteurs (des hadith) et il (Tabari) ne  connait personne qui les contredit. At-Tabari et ceux venus après lui jugent la dernière orthographe (djidd) faible. Le terme signifie dans ce cas: effort ardent.C’est -à-dire l’effort ardent à lui seul ne sert à rien à son auteur auprès de Toi car ce qui le sauvera c’est Ta miséricorde. On dit qu’il s’agit de dire que l’effort soutenu dicté par l’ardent désir de gagner les biens d’ici-bas (se révélera vain dans l’au-delà). On dit encore que cela renvoie à la fuite précipitée. C’est-à-dire il ne sert à rein de s’enfuir dans la précipitation car on est toujours sous Ton emprise et Ton pouvoir.

Ce qui est exact et bien répandu est al-djadd: chance, richesse, grandeur et pouvoir ; c’est pour dire que ni la chance obtenue ici-bas qui se concrétise par les biens , les enfants, la grandeur et le pouvoir ne profite pas à leurs détenteurs auprès de Toi car cela ne les sauvera pas. Ce qui garantira le salut c’est la bonne oeuvre d’après la parole du Très -haut: Les biens et les enfants sont l'ornement de la vie de ce monde. Cependant, les bonnes œuvres qui persistent ont auprès de ton Seigneur une meilleure récompense et [suscitent] une belle espérance. (Coran,18:46)

Cela étant , il est clair que la bonne orthographie est ta’aalaa djadduka et que le dernier terme signifie grandeur.L’orthographie qui donne djduka est inexacte. Elle aboutit à la modification des propos du Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) car il a bien dit djadduka. Les recherches menées n’ont pas permis de trouver un seul uléma qui soutient une autre orthographie à propos du hadith concerné. Celle qui donne djidduka change le sens du hadith car le terme djidd signifie effort soutenu consenti dans un travail. C’est le contraire de la torpeur. Sens qui n’est pas voulu dans ce hadith.

Le devoir de celui qui veut attirer l’attention des gens sur une faute qu’ils ont commise est de s’assurer de la véracité de ce dont il parle avant de le diffuser. Ceci s’impose davantage quand on traite de dispositions religieuses et de hadith prophétiques pour éviter de mentir sur le Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) inconsciemment et éviter d’interdire ce qui est juste et de recommander ce qui erroné car alors on ferait partie de ceux dont on dit: Ceux dont l'effort, dans la vie présente, s'est égaré, alors qu'ils s'imaginent faire le bien. (Coran,18:104). Allah le sait mieux.

Résumé de la réponse: la bonne orthographie à retenir c’est ta’aalaa djadduka, le dernier terme signifiant grandeur. L’orthographie qui donne djidduka n’est pas exacte car elle aboutit à la modification des propos du Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) car il a prononcé  djadduka . Les recherches n’ont pas permis de prouver qu’un uléma quelconque ait dit le contraire.49

Source: cheikh Muhammad ibn Outhaymine (Rencontre mensuelle 17)